À la mémoire de Claude Jeannot
15 juillet 1954 – 10 mai 2011
15 juillet 1954 – 10 mai 2011
L'ami Claude Jeannot est parti subitement, sans faire de bruit, le mardi 10 mai, 2011 à l’âge de 56 ans.
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Invitation pour le samedi 1er février 2014
Soirée hommage a Claude Jeannot le samedi 1er février de 19h
à 23h au Vétiver (8145, rue Saint-Denis angle Jarry). Entrée :
20$ (incluant le cd hommage a Claude Jeannot)
Beaucoup de musiciens viendont rendre un hommage spécial a ti Claude : Harold
Faustin, Ti flute, Pageot,Tti Claude Marcelin, Pascal et Toto, Kazo, Milo, Gary
Crèvecœur, Marie Alice Marcel, Wakim, etc.
On aura aussi les photos des anciens musiciens haïtiens depuis 1953
présenté par Lopez spécialement pour Ti Claude Jeannot.
Une pensée spéciale pour notre frère Ti Claude Jeannot que nous aimions
tous ainsi qu’a ses parents, Marie Luce, ses amis pour qui il était si dévoué.
Nous avons tous perdu une perle rare et plus le temps passe plus on le sent.
Claude est inoubliable et on l'aimera toujours.
Il y aura la vente signature du dernier cd de Toto en hommage a Ti
Claude ayant 14 musiques dont 8 joués par Ti Claude et Toto live pendant certains
concert du Festival de jazz off avec Éval Manigat. Tout un cd.
Toto jouera
les musiques fétiches de ti Claude avec la guitare de ti Claude et tous les
autres musiciens s’exprimeront aussi avec des thèmes a la ti Claude Jeannot.
Réunissons nous une dernière fois pour remémorer la pensée notre ti claude
national.
-30-
Source : Toto Laraque – totolaraque@yahoo.com - le 30 janvier 2014
Article d'Yves Bernard au sujet du cd :
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Ci-dessous le texte de l'éloge funèbre
prononcé par son ami, son frère, Roland Paret, le mardi 17 mai 2011
Claude Jeannot est mort : l’amitié est veuve, la guitare est orpheline, la musique est en deuil, nous nous sentons appauvris, et Montréal est dépeuplé. Les poètes, qui se souviennent que jadis le même vocable, « musikè », désignait à la fois la poésie et la musique, conteront un jour l’histoire de cette guitare laissée, à la recherche de son joueur, qui ne le trouve pas, qui s’en désole.
Comme les doigts du musicien, tambourineur, violoniste, pianiste, ou guitariste, lui font mal quand ils ne jouent pas depuis un certain temps, de la même façon, d’un autre coté, l’instrument a mal quand il n’est plus utilisé, et la guitare de Claude, abandonnée, s’étiole : plus personne n’en jouera, plus personne n’osera en jouer, elle se laisse mourir sur la tombe de son maître, les bois se dessèchent, le sillet s’affaisse, les cordes s’amollissent, se distendent, les sons se perdent, la rosace s’assourdit, la guitare meurt. Comme la flute de Tamino, comme les clochettes de Papageno, la guitare de Claude était enchantée et nous transportait dans un monde autre, le seul peut-être où nous pouvons rencontrer l’Absolu, qui est l’autre nom de Dieu.
Le père Tremblay, un ami jésuite à moi, disait que sans la musique, Dieu n’existerait pas, car si la musique n’est pas la seule à nous faire sortir de nous-mêmes – l’amour est capable, vous le savez comme moi, de nous catapulter hors de notre enveloppe - elle est celle qui nous hisse le plus haut au-dessus de nous-mêmes - nous en entier, avec notre intellect et notre cœur - elle est celle qui nous fait grimper des sommets autrement inaccessibles, elle est celle qui nous montre le visage de Dieu, ou plutôt celle qui nous fait entendre sa voix. Car si, incontestablement, « la parole est la maison de l’être », la musique est la soie dont l’être se vêt pour aller dans le monde. La musique, ne l’oublions pas, est peut-être le seul endroit où peut s’établir le dialogue entre Dieu et l’Homme : ne dit-on pas que la mélodie est la prière que l’Homme adresse à Dieu et que l’harmonie est la réponse que Dieu fait à l’Homme ? La musique est la véritable échelle qui permit à Jacob de grimper jusqu’à Dieu. La musique est peut-être, de ce fait, une preuve, plus solide, bien plus évidente que les preuves philosophiques ou théologiques, de l’existence de Dieu.
La mort, comme la vie, est injuste, on le sait. On a beau les courtiser, elles se montrent, toutes les deux, seulement quand elles le veulent bien, et à qui elles le veulent bien. Nombreux sont ceux qui appellent la mort, et la mort se dérobe ; plus nombreux encore ceux qui s’accrochent désespérément à la vie, et la vie s’enfuit. C’est peut-être l’une de ces deux-là, la vie ou la mort qui, quelque part dans les Textes sacrés, dit : « J'ai exaucé ceux qui ne me demandaient rien, je me suis laissé trouver par ceux qui ne me cherchaient pas. » Dieu, la mort, la vie, la maîtrise d’un art, ne se laissent voir, ne se laissent trouver, ne se laissent avoir, que par ceux qu’ils veulent bien, et non pas par ceux qui les cherchent, même avec la volonté la plus dure. Ils répondent à leur logique et non à la prière des Humains.
Claude ne cherchait pas la mort, et pourtant elle s’est montrée à lui ; d’autres qui l’ont cherchée avec désespérance, qui l’accueilleraient avec gratitude, ne l’ont pas aperçue - pas encore – et l’on sait que souvent un bonheur ou un malheur, et la mort peut être en même temps un bonheur et un malheur, arrivent souvent trop tard ou trop tôt. Claude maîtrisait son art, il le voulait, la maîtrise de cet art s’est montrée à lui, parce qu’il le méritait, et aussi parce qu’elle le voulait : une fois au moins, et ce n’est pas coutume, la volonté d’un homme et celle d’un savoir se sont rencontrés. Quelqu’un que j’aime beaucoup a écrit « qu’il ne saurait croire qu’à un Dieu qui dansât ». C’est peut-être ce Dieu en devenir, en instance de sa réalisation, qui, par une espèce d’anticipation de sa réalité, passant, en direction de son accomplissement, un après-midi devant l’appartement de la rue Henri-Julien, entendit la guitare de Claude, et se dit qu’il avait enfin rencontré la musique nécessaire à sa chorégraphie, donc à son existence, et qui l’appela à lui.
Claude ne cherchait pas la mort, et pourtant elle s’est montrée à lui ; d’autres qui l’ont cherchée avec désespérance, qui l’accueilleraient avec gratitude, ne l’ont pas aperçue - pas encore – et l’on sait que souvent un bonheur ou un malheur, et la mort peut être en même temps un bonheur et un malheur, arrivent souvent trop tard ou trop tôt. Claude maîtrisait son art, il le voulait, la maîtrise de cet art s’est montrée à lui, parce qu’il le méritait, et aussi parce qu’elle le voulait : une fois au moins, et ce n’est pas coutume, la volonté d’un homme et celle d’un savoir se sont rencontrés. Quelqu’un que j’aime beaucoup a écrit « qu’il ne saurait croire qu’à un Dieu qui dansât ». C’est peut-être ce Dieu en devenir, en instance de sa réalisation, qui, par une espèce d’anticipation de sa réalité, passant, en direction de son accomplissement, un après-midi devant l’appartement de la rue Henri-Julien, entendit la guitare de Claude, et se dit qu’il avait enfin rencontré la musique nécessaire à sa chorégraphie, donc à son existence, et qui l’appela à lui.
Ces derniers jours qui ont suivi cette nouvelle qui nous a stupéfiés, qui nous a laissés incrédules, nous nous sommes réunis, quelques copains, plusieurs groupes de copains, en fait, et nous nous sommes aperçu que chacun de nous avait son Claude. Il y avait tellement de Claude ! Et il y avait tellement de profondeur dans chaque Claude ! Il y avait l’allié sûr, capable d’organiser une expédition en enfer pour en ramener un ami ; il y avait le militant fort de ses convictions, si convaincu qu’il ne cherchait pas à convaincre les autres ; il y avait le conjoint, le fils et le frère ; il y avait le musicien merveilleux, seigneur des notes, esclave de la musique, et nous avons déjà la nostalgie de ces sons qui nous comblaient. J’enviais sa connaissance des proverbes, il en avait un pour chaque circonstance, et tous ces Claude-là réunis finissent dans cette petite urne devant nous, que nous regardons, perplexes. En la fixant, nous nous disons : voilà à quoi aboutissent nos bruits et nos fureurs, nos désirs d’absolu, nos besoins de ciel, nos orgasmes et nos agonies, notre crainte des enfers et nos espoirs de paradis ! À ça ! À ces cendres, Luce, tellement plus froides que le sourire de Claude quand il te regardait ! À ces cendres dans cette urne, Germaine, cette urne encore plus petite que le bébé que, à sa naissance, vous aviez accueilli dans vos bras.
Voilà définitivement tu un instrument essentiel de cette petite musique de nuit qui assure la cohérence de notre être et sans laquelle nous ne saurions vivre. Mais si la rose la plus belle « est l’absente de tout bouquet », si « l’essentiel réside toujours dans l’invisible », si la vérité la plus évidente est celle que nous ne pouvons toucher, le son le plus mélodieux et le plus harmonieux est celui que nous n’entendons pas. C’est pour cela, Luce, Germaine, que si vous prêtez attention, vous percevrez, amortis bien entendu par la ouate des multiples espaces et des univers ineffables qu’ils doivent traverser pour parvenir jusqu’à nous, car ils nous arrivent de l’autre coté de la vie, les sons de la guitare de Claude faisant danser le Dieu qu’ils auront aidé à être.
Luce, Germaine, mes condoléances !
Roland Paret, Montréal, le 17 mai 2011
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